Il incarne la belle époque des orchestres latines parisiennes, j'ai pu le voir se produire avec Mambomania dans les grands lieux de la "salsa" qui nous ont fait tant danser dans les années 90 à Paris, La Java, La Coupole, Aux Etoiles. Chanteur charismatique, élegant, généreux, qui savait nous embarquer dans son île, rien qu'avec le son de sa voix.
Né à La Havane, il n'envisageait pas de devenir chanteur, seulement il aimait chanter, encouragé par l'enthousiasme de ses camarades ouvriers de la manufacture de cigares Romeo y Julieta qui, suivant une vieille tradition, le sollicitaient souvent pour rouler les feuilles de tabac en musique. Puis, invité une première fois à participer à un gala d’une association de « gens de couleur » le 31 décembre 1935, il n'a plus jamais cessé de chanter. Dès son enfance il écoute les sextetos et septetos (Habanero, Cuba, Boloña …) qui répétaient à deux pas de chez lui, dans le quartier de Pueblo Nuevo à La Havane. C'est ainsi qu'il a commencé à fréquenter, par exemple, Ignacio Piñeiro, l’un des plus grands compositeurs cubains, fondateur du Septeto Nacional.
Il a commencé en chantant des danzonetes (mélange de son et de
danzón) au sein de formations de type charanga puis il a interprété des
boléros, sones, cha-cha-chas ... Au début, dans les orchestres
d’Obdulio Morales, Madrid, Cosmopolita, Habana Casino. Mais il avait aussi un
répertoire bien à lui, qui incluait des compositions de grands maestros comme
Obdulio Morales ou Gilberto Valdés, ce qui a éveillé l'intérêt d’Ernesto
Lecuona. Celui-ci l'engagea, dès la fin des années 1930, pour plusieurs tournées
internationales au sein d’une compagnie à Porto-Rico, en Argentine, au Chili, au
Pérou... Bola de Nieve, parmi de nombreux autres artistes, était de ces voyages.
On retrouve encore Oscar aux cotés de Rita Montaner, dans la version
cinématographique de la zarzuela María la O, de Lecuona.
Venu à Paris la première fois en janvier 1951, Oscar a été embauché tout de suite dans des cabarets et dancings. A l'âge d'or du mambo et du cha-cha-cha à Paris, les chanteurs et percussionnistes cubains étaient rares et très appréciés par les orchestres français. C’est ainsi qu’il a travaillé longtemps avec Raymond Legrand, Eddy Warner, Los Cangaceiros, pour ne citer que les orchestres les plus connus.
Il n'a pourtant jamais rompu les ponts avec son île natale. A chaque retour à
Cuba, l’attendaient à nouveau d’intenses périodes de travail à la télévision et
à la radio, puis sont venus les hommages, la reconnaissance des musiciens et les
interviews dans la presse.
Oscar López, a chanté partout en France aux cotés de l'orchestre MAMBOMANIA, tout au long des années 1990.
La disparition d'Oscar López survenue à l'âge de 86 ans à
Paris le 10 avril 2004, boucle un cycle de vingt ans qui a vu s'évanouir les
participants de la trop méconnue scène parisienne de la période de l'âge d'or -
pré- révolutionnaire - de la musique cubaine, dont les participants ont
continués de cheminer sous nos cieux, vaille que vaille entre 'guajira
guantanamera' et cha cha chas dans les années "Che Guevara" (qui
étaient aussi les années yéyés), avant les premiers frémissements parisiens des
années '70 autour de la Salsa. Ce cycle avait commencé par la mort à Paris du
chef d'orchestre Raúl Zequeira en 1984. Il finit par les disparitions
successives du guitariste Don (Emilio) Baretto (présent à Paris depuis les
années 20'!) puis, de son frère percussionniste, Sergio Baretto, ou encore le
trompettiste "Pepín" Vaillant (qui était retourné il y a bien
longtemps vers son Santiago de Cuba). Oscar López, au bout de sept décennies de
carrière, a été le dernier de cette histoire des musiciens cubains débarqués à
Paris avant la Révolution cubaine.